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Entre la nature et le marché

26 années de politique commune des pêches

Texte de Jacques Le Meur pour l’Espace des sciences/Maison de la Mer – 2009

La politique européenne la plus intégrée

Par Maurice Benoish,

ancien président de l’OP Proma et de l’Association Européenne des Organisations de Producteurs, actuel président de la société mixte concessionnaire du port de pêche de Lorient.

« La PCP est la première manifestation globale de l’Europe organisée. C’est la politique la plus intégrée, bien plus que son équivalente agricole. Son ampleur se mesure aussi au siège de Bruxelles, où la Direction des pêches est passée de 25 agents au début des années 1980 à 450 aujourd’hui, pendant que la flotte était divisée par trois ».

« La PCP, à ses débuts, était centrée sur l’Europe du Nord pour faire face aux problèmes du cabillaud, du hareng, du maquereau. C’est toujours le cas aujourd’hui. L’idée d’éventuels quotas individuels transférables fait partie de la culture des pays du Nord. Il existe ainsi deux philosophies, celle du nord où l’on exploite seulement 4 espèces cibles et celle du sud où la pêche repose sur 75 espèces. Les réalités sont donc différentes au niveau de la ressource. Au sud, l’État est plus présent, la solidarité est plus importante et la petite pêche à sa place. Nous devons refuser ces quotas négociables parce qu’en France on ne s’endette pas pour acheter des droits de pêche. Il faut empêcher toute concentration financière de ces droits « …

La politique européenne la plus intégrée

Une réforme nécessaire, mais mal conduite

Par Yves Foëzon,

directeur adjoint de l’organisation de producteurs Pêcheurs de la Manche et de l’Atlantique.

« La PCP est mal vécue par nombreux pêcheurs à cause du mode d’application de ses règlements. Les marins ont une grosse capacité d’adaptation, dans un métier ou l’on rebat les cartes tous les ans, en ajoutant des exigences sans effectuer de réel bilan des mesures précédentes. On en demande toujours plus sans jamais tenir compte des efforts accomplis par les pêcheurs. Ils subissent un certain dogmatisme et, pour le futur, craignent le poids croissant de la défense de l’environnement. Nous leur expliquons toujours qu’ils ne peuvent éviter ces questions parce qu’ils travaillent sur des animaux vivants »…

« L’objectif de parvenir au « rendement maximal durable » passe par la réduction du nombre de bateaux. Mais nous risquons de ne plus pouvoir capturer la ressource quand elle sera suffisante. L’Europe nous dit de faire des efforts pour que tout aille mieux après. Mais pour qui ? Aujourd’hui, pour mener cette réduction, on cumule des contraintes qui pénalisent des jeunes pourtant désireux de se lancer. Ils risquent d’être découragés ce qui nous conduirait a une perte de savoir-faire ».

« La perception des responsables professionnels, c’est la volonté de croire en l’avenir de ce métier. L’adaptation actuelle est un mal nécessaire. Il faut aller vers la conservation de la ressource mais aussi de l’activité, en préservant des équilibres socio-économiques. Par exemple, Lorient doit pouvoir conserver des flottes hauturière et côtière et, à terre, maintenir des structures portuaires ».

Associer professionnels et scientifiques

Fabien Dulon,

directeur général de Scapêche, armement du groupe Intermarché

« La politique commune est une nécessité, car le pêcheur est un chasseur. Il doit être encadré pour éviter la sur-exploitation, sinon, la gestion se ferait par dépôt de bilan… Dans ce qui nous préoccupe plus particulièrement, les poissons de grands fonds, nous subissons en 2009 des baisses substantielles de quotas, par exemple moins 10 % pour le sabre noir et moins 45 % pour le siki. Or, nos patrons constatent que la ressource est là, que nos rendements sont soit stables soit plus élevés sur des espèces présentées comme en difficulté. Nous souhaitons que l’évaluation des ressources associe davantage producteurs et scientifiques ».

« Dans le cadre européen, la pêche française fait face à deux difficultés. La représentation professionnelle française est éclatée et nous ne parlons pas d’une seule voix. Sans être protectionniste, il faut mettre en valeur l’origine française de nos produits. Nous nous interrogeons également sur le rôle de l’État dans la mesure ou nous sommes dans une période de transition entre le national et le communautaire. Si l’État assume toujours son rôle régalien, est-il le soldat de l’Europe ? « .

Viser le rendement maximal durable

Par Alain Biseau,

biologiste des pêches à la station Ifremer de Lorient, expert international en halieutique.

 » Pour fixer le niveau des quotas, l’Europe sollicite les scientifiques du Conseil International pour l’Exploitation de la mer (CIEM). Elle prend en compte leur avis sur le plan biologique et y ajoute des considérations socio-économiques. Depuis quelques années, l’Union essaie de mettre en place des plans de gestion pluri-annuels des quotas pour mieux fixer les règles du jeu ».

L’avis des scientifiques repose principalement sur des données recueillies auprès des pêcheurs.  »  Nous analysons les débarquements dans les ports par échantillonnage. Nous embarquons aussi sur les navires professionnels pour étudier l’ensemble de ce que capture un chalut. Nous disposons enfin de nos propres données recueillies au cours de campagnes scientifiques ».

« Aujourd’hui, la situation est difficile et l’exploitation des stocks dépend fortement des jeunes poissons. Cela signifie que, dans une année donnée, on pêche déjà ceux qui sont nés l’année précédente. Sur certaines espèces, la situation est meilleure parce que les pêcheurs exploitent plusieurs classes d’âge, 10 à 15 par exemple dans le cas de la lotte ».

« La gestion par TAC et quotas est indispensable, mais pourrait être complétée par une maîtrise de l’effort de pêche ou une individualisation des droits de pêche sous contrôle public. Après des efforts, il sera possible de parvenir au rendement maximal durable et d’aller moins en mer pour pêcher autant « . Ce rendement est le niveau maximal de capture qui est compatible avec la préservation et le renouvellement des stocks de poisson.

Viser le rendement maximal durable